Un féminisme SEXISTE !
La société patriarcale résiste, mais elle est aujourd’hui condamnée par une société dite moderne qui se veut égalitaire. Des féministes luttent, à juste titre, pour mettre fin aux injustices criantes qui perdurent entre les femmes et les hommes et nuisent à la démocratie mais, devant la lenteur des avancées, un nouveau féminisme, en se radicalisant et en déniant la différence des sexes, ne devient-il pas à son tour sexiste ?
La société patriarcale a dominé pendant des millénaires. Elle commence à être contestée vers le XVème siècle lorsque les humanistes se mettent à douter de l’origine divine des autorités sur terre. La remise à plat de tout ce qui a été établi jusque-là par les hommes au pouvoir amène le siècle des Lumières, la Révolution, les mouvements libéraux puis démocratiques, et au XXème siècle, la victoire de la démocratie. « La révolte contre le père » des années 1960-1970 s’attaque à toutes les traces restantes de l’idéologie patriarcale et de nombreuses revendications aboutissent : l’autorité parentale, l’IVG, l’égalité salariale… C’est ainsi qu’en cinquante ans les conquêtes féministes ont considérablement bouleversé la société, en étant, acceptées par le plus grand nombre. Il ne peut être, en effet, question de s’opposer à ce qui apparaît comme une évolution normale vers le progrès.
Si le patriarcat n’est pas mort, son idéologie n’est plus dominante. Et parce qu’il est, malgré tout, encore trop présent, des féministes continuent la lutte pour faire mieux respecter les nouvelles lois et pour réclamer encore plus d’égalité. C’est ainsi que, sans toujours s’en rendre compte, n’est plus réclamé le respect de l’égalité en dignité et en droits, inscrite dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et dans la Constitution, mais l’égalité femmes-hommes. La différence paraît minime, pourtant n’est-ce pas parce que l’on pense que les femmes seraient semblables aux hommes, et donc devraient avoir les mêmes motivations, les mêmes comportements, les mêmes résultats, que l’on parle de sexisme quand il n’y a pas une parité parfaite dans une assemblée, dans une profession, quand il n’y a pas une égalité parfaite au niveau des salaires, non pas pour le même travail mais en valeur absolue (c’est-à-dire sans tenir compte du poste, du nombre de personnes et d’heures de travail, de la qualification, de l’ancienneté…) ? N’est-ce pas parce que l’on pense que les femmes seraient semblables aux hommes qu’est mis dans la loi l’adoption pour tous de petits enfants (avec le mariage pour tous) et la PMA pour toutes les femmes ? Celles-ci ne considèrent-t-elles pas qu’une femme est l’équivalent d’un homme, et donc qu’une femme peut se passer d’un homme pour élever un petit enfant, et même le remplacer ? C’est ainsi que, de même que les hommes ont pendant longtemps considéré que la présence des femmes en politique n’était pas nécessaire, l’inutilité du père dans l’éducation d’un petit enfant est « institutionnalisée » ! Outre le fait qu’il peut paraître contradictoire, quand la parité est réclamée dans tous les domaines, de la refuser dans le couple parental, a-t-on vraiment conscience de suivre ce qui est appelé à tort la « théorie du genre », une théorie du genre qui, effectivement, n’existe pas, parce que ce n’est qu’un postulat et qu’il est, en plus, erroné ?
Les Etudes de genre ont fait progresser la démocratie dans les années 1970 en mettant en évidence la construction sociale. Mais actuellement elles ne veulent plus simplement montrer ce qui, dans les inégalités entre les femmes et les hommes, vient de la construction sociale sexiste, qu’il faut toujours combattre, mais que toutes les inégalités sont construites par la culture. Il y a effectivement de très nombreuses injustices à éradiquer et il est vrai que de nombreuses inégalités dans les comportements et les résultats peuvent venir d’une construction sociale et de discriminations sexistes. Mais est-ce toujours le cas ? S’il est en effet évident que la nature ne suffit pas à expliquer toutes les différences, il est aussi totalement impossible de prouver que ces dernières ne dépendraient que de l’environnement social. Il se pourrait aussi, et des études[1] et certaines, reprises par Boris Cyrulnik affirment, que des différences biologiques et notamment les différences hormonales, entraînent des motivations et des comportements différents.
Les différences femmes-hommes pourraient même avoir d’autres origines. Si le fait d’offrir une poupée ou un camion à un petit enfant a une influence sur son devenir, le fait de naître d’une personne du même sexe avec un corps de femme capable de mettre au monde un enfant ou d’une personne de l’autre sexe, avec un corps d’homme, n’en a-t-il pas au moins autant ?[2] Ne faut-il pas être dans la mauvaise foi pour ne pas concevoir, comme de nombreux psychologues, que tout enfant, qu’il soit garçon ou fille, puisse percevoir sa maman toute-puissante, et garder dans son inconscient cette image ? Ce fantasme n’influencerait-il pas différemment nos comportements que l’on soit femme ou homme ?
La différence des sexes est toujours difficile à assumer. L’humain aime l’unité et l’harmonie qui le renvoient à ce qu’il a vécu dans le ventre de sa mère, dans ce milieu toujours à la même température, à l’abri des chocs, des lumières vives, des sons forts et aigus, un milieu où tous les besoins sont satisfaits, sans faire d’efforts, sans même avoir à demander. Avec le traumatisme de la naissance qui l’a fait basculer dans la vie avec toutes ses différences, l’inspiration, l’expiration, le chaud, le froid, le dur, le mou, le sucré, le salé, l’aigu, le grave, le jour, la nuit… ce qu’il a mémorisé de son vécu intra utérin lui apparaît totalement paradisiaque et il aspire à le retrouver. C’est la source des désirs les plus profonds. Tony Anatrella dit que « L’inconscient est hostile à l’altérité et à toute différence »[3]. Celle-ci oblige, en effet, à faire des efforts pour s’adapter. Pire, elle questionne l’humain en quête d’identité sur sa normalité. Lorsqu’un individu rencontre des personnes qui lui ressemblent, cela le tranquillise. Si d’autres ont la possibilité d’être différents, il se met à douter de ce qu’il est. « L’étrangèreté »[4] le contrarie. Si un léger questionnement peut favoriser sa réflexion, trop d’interrogations le déstabilisent. C’est ainsi que, pour résoudre leurs angoisses, des humains ont toujours trouvé des solutions faciles. En jugeant anormale la différence de l’autre, cause de leur trouble, ils se persuadent d’être « comme il faut » et d’avoir raison de rejeter ce qui dérange. En attribuant les défauts à l’autre, ils se placent dans le bon camp et s’évitent des questions.
En faisant des femmes "des hommes incomplets"[5] et en les jugeant inférieures parce qu’elles ne se comportent pas comme eux, des hommes n'assument pas et ne respectent pas la différence du sexe féminin. Cette idéologie patriarcale est heureusement condamnée pour sexisme. En jugeant qu'il y a « égalité femmes-hommes » au lieu de seulement « égalité en dignité et en droits » et en faisant des hommes, des humains en retard, mal éduqués[6] ou malades[7], s'ils ne se comportent pas comme les femmes, des personnes suivant l’idéologie néo-féministe n'assument pas et ne respectent pas la différence masculine. Cette idéologie est sexiste. Il y a toujours une infériorisation de la différence et ce nouveau sexisme, passé sous silence, est encore plus pervers. Alors que la nature était jugée responsable de l’infériorité de l’ensemble des femmes, c’est, en effet, avec ce sexisme qui ne dit pas son nom, l’individu homme qui est maintenant rendu responsable et même coupable de la sienne.
La différence est toujours difficile à assumer et si le désir d’unité est naturel, vouloir le réaliser tient, par contre, de l’utopie. Sachant où nous ont entrainés les rêves d’unité de race et d’unité de classe, ne serait-il pas nécessaire d’être attentif à ne pas verser dans la quête d’unité de sexe, en confondant les revendications d’égalité en dignité et en droits, plus que légitimes, et le droit à une égalité femmes-hommes, totalement illusoire ?
La condamnation du sexisme des hommes qui n’assument pas et ne respectent pas la différence des femmes n’améliore pas vraiment la convivialité entre les sexes, quand l’idéologie néo-féministe, devenue dominante, en déniant et ne respectant pas la différence des hommes, qu’elle n’assume pas davantage, développe un nouveau sexisme des femmes envers les hommes. Comment ce nouveau sexisme, comme tout sexisme, pourrait-il ne pas avoir des conséquences délétères sur les rapports femmes-hommes, sur l’éducation des enfants, sur la société toute entière ?
Jean Gabard conférencier et auteur de :
« Le féminisme et ses dérives Du mâle dominant au père contesté » Les Editions de Paris Max Chaleil, Paris, 2006, réédité en 2011 avec un nouveau sous-titre « Rendre un père à l’enfant-roi ».
« Materner ou éduquer Refonder l’école », Les Editions de Paris Max Chaleil, Paris, 2016.
« Le néo-féminisme contre la famille », Les Editions de Paris Max Chaleil, Paris, 2023
[1] Pour le
Professeur Simon Baron-Cohen,[1] c'est le niveau de testostérone, quand l'enfant est encore dans l’utérus, qui produit des caractéristiques et des centres d'intérêts différents chez la femme et l’homme.
[2] Marie Durut-Bellat dans L'école des filles écrit : « Il y aurait construction sociale inconsciente. Par contre l’inconscient ne pourrait pas avoir été influencé par le fait d’être un garçon ou une fille, par le fait pour le garçon de ressembler au papa, par le fait pour la fille de ressembler à la maman qui met les enfants au monde, par le fait que la fille a le corps fait pour mettre des enfants au monde, par le fait que le garçon est chargé de testostérone pour le forcer à ne pas se structurer comme une fille »
[3] Tony Anatrella : La différence interdite Sexualité, éducation, violence Trente ans après Mai 1968, Flammarion, 1998.
[4] Renaud Camus, Du sens, P.O.L., 2002.
[5] Aristote
[6] Ivan Jablonka : Ce n’est plus aux femmes de se remettre en cause, (…) C’est aux hommes de rattraper leur retard sur la marche du monde.
les femmes semblent « objectivement » supérieures aux hommes
Au XXe siècle, le féminisme consistait à vivre « comme les hommes » ; un jour, il aidera les hommes à vivre « comme les femmes » Ivan Jablonka, Des hommes justes - Du patriarcat aux nouvelles masculinités, Seuil, 2019.
[7] Elisabeth Badinter intitule l’introduction de la deuxième partie de son livre « XY de l’identité masculine » (Odile Jacob, 1992) : « Vers la guérison de l’homme malade. »
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Quelle autorité aujourd’hui
pour que les enfants intègrent les limites ?
En 1970, l’autorité parentale remplace l’autorité paternelle et bouleverse la place de la mère et du père dans la famille. L’autorité elle-même, qui apparaissait incontestable, n’est plus évidente aujourd’hui. La remise en question de ce qui ressemblait plus à de l’autoritarisme qu’à de l’autorité, était nécessaire mais n’a-t-elle pas abouti aujourd’hui à un manque d’autorité, cause de la multiplication des incivilités, de la délinquance, de la violence…? L’autorité parentale aurait-elle été mal comprise ?
Dans la famille, la petite fille mise au monde par une personne du même sexe qu’elle et le petit garçon, né d’une personne du sexe opposé, n’ont pas le même rapport avec le papa et avec la maman qui leur a tout apporté et qui pour cela est perçue toute-puissante. La structuration différente de leur psychisme, conditionne leur rapport à la loi. Fantasmée toute-puissante, la maman ne peut jouer les mêmes fonctions symboliques que le père avec un petit enfant (moins de 6 ans). Ce qu’elle fait et dit est toujours interprété différemment par la petite fille et le petit garçon, qui, s’ils peuvent enregistrer énormément de sensations, n’ont pas encore les moyens de tout comprendre. Cette maman peut faire preuve de sévérité, comme un homme, mais si elle fixe seule des limites sans faire intervenir un tiers différent, l’enfant risque de ne pas les intégrer. Il peut se soumettre, mais c’est surtout pour lui faire plaisir et ne pas la perdre. Quand la maman veut le limiter, l’enfant lui n’a souvent qu’une idée : l’imiter et rester comme il la perçoit, dans la toute-puissance avec elle. Il n’est pas question de loi à respecter puisque, pour lui, les mots viennent d’un lieu où la limite n’existe pas. Contrairement à l’enfant victime de l’autoritarisme qui peut rejeter la loi, lui, a peu de possibilité de la connaître ! Il risque d’avoir des difficultés à la respecter et à assumer les frustrations. Cet enfant-roi, difficile à gérer dans la famille où il tient pourtant à garder l’amour de ses parents, risque de l’être encore plus en société et particulièrement à l’école où il sera confronté aux règles de la discipline, de la lecture, de l’écriture, de l’orthographe, de la grammaire, du calcul …
Un homme (qui n’est pas forcément le géniteur ou le papa) n’a pas mis au monde l’enfant. Resté longtemps « l’étranger », il n’est pas perçu tout-puissant et se trouve mieux placé pour faire intégrer les limites aux enfants. Pour cela il doit non seulement jouer la fonction symbolique de père en disant la loi mais aussi être écouté. Et il ne le sera que s’il est « nommé » père en étant aimé, admiré, écouté, valorisé par la mère.
En consentant à se présenter comme quelqu’un qui écoute un père, la maman entre alors dans la fonction symbolique de mère. En donnant l’autorité à un homme, elle signifie à l’enfant qu’elle n’est pas toute-puissante puisqu’elle a besoin de quelqu’un et que cet homme mérite d’être écouté. La loi à laquelle il se plie et qu’il se contente de dire (il ne s’agit pas de faire sa loi), sera plus facile à entendre. L’exemple de ses parents assumant leur non toute-puissance (Le macho qui ne respecte pas la femme ne peut être dans la fonction de père) aidera aussi l’enfant à mieux supporter les frustrations.
Il semble donc que le tout petit enfant qui ne voit pas la réalité comme l’adulte, ait besoin de ce « jeu » pour mieux intégrer la loi dans les premières années. S’il l’assimile à cet âge, il pourra, par la suite et après des années d’explications, comprendre que la loi puisse être dite aussi par la mère et par d’autres. Il ne faut cependant pas oublier, même si la tendance est de « l’adultifier » trop tôt, que le petit enfant n’aspire qu’à fusionner avec sa maman. De même qu’il a eu des difficultés à supporter que sa maman ait eu besoin d’un homme pour enfanter (le mythe de la vierge Marie), il résiste à admettre que sa maman puisse être limitée. C’est en effet, pour lui, assumer qu’il n’est pas tout-puissant lui-même alors qu’il a cru être l’enfant-roi d’une déesse ! C’est pour cela qu’il reste longtemps nécessaire de répéter sérieusement mais sans se prendre au sérieux, ce qui n’est qu’un « jeu » permettant aux enfants d'intégrer les limites.
La différence des sexes est une limite qui n’autorise pas les discriminations. Lorsqu’elle est assumée, respectée et donc gérée démocratiquement, elle permet aux femmes et aux hommes de jouer les fonctions symboliques de mère et de père et de faire exister une autorité saine. Celle-ci n’est-elle pas une condition de l’éducation des enfants et du vivre ensemble …
Jean GABARD
Conférencier et auteur de
- « Le néo-féminisme contre la famille », Les Editions de Paris Max Chaleil, Paris 2023.
- « Materner ou éduquer – Refonder l’école », Les Editions de Paris Max Chaleil, Paris 2016
Et si les femmes se comportaient comme des hommes, elles ne seraient pas considérées inférieures dit le sexisme des hommes que la différence des femmes gêne et qu'il n’assume pas. Et si les hommes se comportaient comme des femmes, ils ne seraient pas déviants, délinquants, violents, violeurs… dit le sexisme des femmes que la différence de l'homme gêne et qu'il n’assume pas... La seule différence entre ces deux sexismes est que le sexisme des hommes envers les femmes est aujourd’hui, heureusement, condamné, alors que le sexisme des femmes envers les hommes est devenu aujourd’hui, malheureusement, la norme et que l’on peut se permettre d’écrire que ce serait beaucoup mieux, « si les hommes se comportaient comme des femmes » (Lucile Peytavin), sans que personne ne porte plainte.
Qui a porté plainte ?
En n’assumant pas la différence des sexes, des hommes comme des femmes préfèrent rester dans l'utopie de l'unité de sexe (comme d'autres étaient dans l'utopie de l'unité de race ou de classe) et refusent de connaître la différence de l’autre et d’apprendre à gérer les deux en mettant des règles. La masculinité et la féminité (qui ne sont ni bonnes, ni mauvaises) n’étant pas gérées, les rapports entre les deux sexes deviennent très difficiles (comme dans la jungle) et ceci empêche femmes et hommes de devenir vraiment humains. Dommage !
Jean GABARD
Auteur de « Le néo-féminisme contre la famille », Les Editions de Paris Max Chaleil, Paris, 2023.
Conférencier relations femmes / hommes éducation des enfants
La propagande sexiste
Jean GABARD
Le mot « propagande » et le mot « idéologie » rappellent des concepts d'un autre âge. Ces mots font penser au nazisme ou au communisme et sont connotés péjorativement. Aujourd'hui, avec le progrès de la démocratie, la tendance est plutôt de se sentir à l’abri de ces idées aussi extrêmes et de ces méthodes aussi grossières. Et pourtant, une idéologie n’est-elle pas plus efficace lorsqu’elle est subtile et que l’on a la conviction d’être suffisamment libre de penser pour n'en suivre aucune ?
Aujourd'hui une croyance domine. Elle a séduit une très grande partie de la population des pays occidentaux. Il faut dire qu'elle bénéficie d'atouts importants. Dénonçant une idéologie sexiste rétrograde, elle ne peut que faire l'unanimité. Quand la devise de la République est « liberté, égalité, fraternité » et qu’est affirmé le principe de non-discrimination en raison du sexe, l’égalité femme-homme ne peut qu’être évidente. Quand le président de la république française lui-même en fait l'objectif de son premier mandat et qu’est mis en place un ministère chargé de l'Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations ainsi qu’un Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes, celui qui la conteste fait figure de marginal, de sexiste, de réactionnaire, de « masculiniste ». Sa critique ne sera pas interdite mais rendue inaudible ! Comment, en effet, ne pas soutenir la lutte contre la construction sociale et les discriminations sexistes et celle pour l’égalité qui semblent inséparables ?
Cette « idéologie » s'impose très facilement en profitant de la confusion entre « égalité en dignité et en droits » inscrite dans la Constitution et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et « égalité ». Beaucoup n'y voient qu'un raccourci alors que c'est bien l'égalité réelle qui est revendiquée. Les Etudes de genre qui voulaient dénoncer ce qui dans les inégalités venait de la construction sociale et des discriminations sexistes, affirment maintenant que toutes les différences (autres que physiques et biologiques) viennent de la construction sociale et des discriminations sexistes. Elles seraient donc injustes. On sait pourtant, depuis quelques années que ce postulat, dit scientifique comme si c’était une théorie, n'est pas valable ! On sait en effet maintenant que des différences biologiques entraînent aussi des motivations et des comportements différents chez les femmes et chez les hommes. De plus, si on ne fait pas preuve de mauvaise foi et que l’on pense à juste titre que l’éducation et la culture ont une influence sur l’avenir d’un petit enfant, on devrait aussi pouvoir admettre, même si on n’en a pas davantage la preuve, que le fait de naître d’une personne du même sexe avec un corps féminin qui pourra mettre un enfant au monde, ou avec un corps masculin d’une personne de l’autre sexe, peut en avoir au moins autant, même et surtout si ces mémorisations, qui n’ont aucun rapport avec la culture, sont davantage enfouies dans l’inconscient. L’idéologie dominante le sait ou devrait le savoir mais, par intérêt pour la cause, persiste à faire croire qu’il y a « égalité femmes-hommes ».
L’idéologie patriarcale traditionnelle a des difficultés à assumer la différence femmes-hommes qui, comme toute différence, insécurise et fait poser des questions. Pour se rassurer sur leur identité, des hommes, depuis des siècles, croient trouver la solution en infériorisant les femmes. Aujourd’hui, en réaction, la nouvelle idéologie dominante, déniant l’altérité, juge en retard[1], malades[2] et mal éduqués, les individus hommes qui ne se comportent pas comme la femme. En considérant que leur éducation est la seule cause de la différence, cette utopie croit éviter, par ce procédé pervers, l’accusation de sexisme. La spécificité des hommes (que l’idéologie patriarcale n’a souvent fait que grossir et très grossièrement) n’est pourtant, parce que déniée, jamais respectée.
Alors que le projet était d’éradiquer le sexisme des hommes envers les femmes, la dénégation de la différence des sexes a abouti à un nouveau sexisme envers les hommes. Le premier est aujourd’hui, très justement condamné, alors que le second, pratiqué par l’idéologie dominante, sans le reconnaître, est entré dans la norme. Ce sexisme se répand discrètement par la seule propagande autorisée en entraînant avec lui des mesures contraires aux intérêts de l’humain (femmes et hommes). Il favorise la « guerre des sexes » alors que la voie qui consiste à prendre vraiment connaissance des dissemblances, à apprendre à les assumer et à les gérer ensemble, est peut-être difficile mais possible et souhaitable !
Jean GABARD
Conférencier et auteur de :
« Le féminisme et ses dérives – Du mâle dominant au père contesté », Les Editions de Paris Max Chaleil, Paris 2006, réédité en 2011 avec le sous-titre « Rendre un père à l’enfant-roi »
« Materner ou éduquer – Refonder l’école », Les Editions de Paris Max Chaleil, 2016.
« Le néo-féminisme contre la famille », Les Editions de Paris Max Chaleil, 2023
[1] Ivan Jablonka : Ce n’est plus aux femmes de se remettre en cause, (…) C’est aux hommes de rattraper leur retard sur la marche du monde.
les femmes semblent « objectivement » supérieures aux hommes
Au XXe siècle, le féminisme consistait à vivre « comme les hommes » ; un jour, il aidera les hommes à vivre « comme les femmes » Ivan Jablonka, Des hommes justes - Du patriarcat aux nouvelles masculinités, Seuil, 2019.
[2] Elisabeth Badinter intitule l’introduction de la deuxième partie de son livre « XY de l’identité masculine » (Odile Jacob, 1992) : « Vers la guérison de l’homme malade. »
La « révolution féministe » a voulu éradiquer l’autoritarisme, le sexisme et la violence. Elle a permis aux femmes d’accéder à de nombreux droits et les luttes continuent pour faire appliquer les lois et les compléter en s’attaquant au patriarcat encore trop présent dans la société.
Une grande majorité de la population a adhéré à ce beau projet et pourtant depuis quelques années on assiste à une montée des mouvements réactionnaires, sexistes, « masculinistes ». On parle de backlash ! Les luttes féministes ne seraient-elles pas aller assez loin ou auraient-elles failli ?
La route est encore longue pour que l’égalité en dignité et en droits soit respectée et pour que le sexisme s’estompe enfin. Il se peut cependant que l’urgence d’arrêter les violences sexistes ait fait confondre vitesse et précipitation et entraîné une sortie de route. Par simplification ou par conviction, le respect de l’égalité en dignité et en droits inscrite dans la Constitution est supplanté par la revendication d’une égalité femmes-hommes pourtant impossible (impossible parce que l’on a maintenant la preuve que les différences femmes-hommes ne sont pas dues qu’à la construction sociale sexiste). Cette utopie, venant de notre difficulté à accepter les différences qui gênent et font poser des questions, se transforme pourtant en croyance, aux conséquences très dommageables.
Depuis des siècles, des hommes qui n’assument pas la différence des sexes, font de la différence de comportement des femmes, une infériorité, et aujourd’hui, des féministes égalitaristes qui dénient aussi la différence des sexes font de la différence de comportement des hommes un défaut qui ne serait que le résultat de leur mauvaise éducation dont ils seraient responsables. Ils ne sont pas jugés inférieurs (ce ne serait pas politiquement correct), mais malades[1], en retard[2], mal éduqués, s’ils ne réagissent pas comme les femmes qui seraient la référence[3].
La différence des sexes n’est toujours pas assumée. Au sexisme des hommes envers les femmes, interdit et condamné, on ajoute le sexisme des femmes envers les hommes, qui devient la norme !
La différence des sexes et notamment celle découlant de la différence de structuration du psychisme (indépendante de la culture), n’est que très peu étudiée et très peu connue puisque déniée. Elle n’est pas prise en compte dans les rapports entre des femmes et des hommes persuadés que leur bien-être consiste à rester naturels et spontanés, alors que sans gestion des différences, sans règles du jeu, ils ne peuvent que récolter les malentendus, les crises, les violences. Des hommes, particulièrement, qui ne comprennent pas pourquoi leurs comportements ne satisfont pas les demandes des femmes, culpabilisent, se sentent humiliés et ruminent leur colère.
La dénégation de la différence des sexes a d’autres conséquences encore plus graves. Elle a fait croire que l’autorité parentale partagée rendait caduque le jeu des fonctions symboliques de mère et de père dans l’éducation des enfants. Confondues aux rôles sociaux sexistes, plus personne ne veut les jouer. Elles sont d’autant plus oubliées que les nouveaux « papas » sont beaucoup plus présents et performants dans les domaines imaginaire et affectif nettement plus agréables.
Ces hommes à qui la femme ne donne pas la fonction symbolique de père, subissent cependant la concurrence « déloyale » de leur compagne à la féminité idéalisée et qui perçue toute-puissante par le petit enfant, peut avoir tendance à devenir omnipotente. Ces nouveaux « papas » prennent ainsi le risque de se voir éjecter quand, « seconde mamans » moins performantes et subalternes, ils peuvent être jugés non indispensables, quand ce n’est pas gênants. Encore une fois humiliés et parfois éloignés de leurs enfants, ils peuvent alors rejoindre le camp des séparés, en guerre contre les femmes.
Dans la famille, quand l’homme n’est plus présent ou pas écouté, c’est la maman qui fixe les limites. Elle croit remplir sa tâche éducative parfaitement alors que le petit enfant obéit souvent, non pas pour respecter la règle posée, mais seulement pour lui faire plaisir et ne pas la perdre. Cette éducation maternante dite « positive » donne depuis « La Révolte contre le père » des années 1960, des enfants-rois « hors la loi » (dans le sens où ils ne l’ont pas intégrée) sans repère, incapables d’assumer la frustration, difficiles à instruire. A la fin de l’adolescence, quand ils éprouvent le besoin de se séparer de maman, des garçons se retrouvent sans modèle de père valable à imiter. Ayant alors la nécessité de se trouver une identité d’homme et n’ayant jamais été confrontés aux difficultés qu’on a pris soin de leur éviter, ils peuvent inventer des jeux pour se mettre à l’épreuve et qui, pour prouver une virilité incertaine, deviennent parfois très dangereux. Ils peuvent aussi s’inventer un modèle d’homme, forcément contraire à la femme, que sans base solide, ils ne peuvent que caricaturer. Il en sortira un macho, un chef de gang, un gourou, un nazi*, un chef intégriste … Des filles, quand elles ne trouvent pas de garçons capables de leur résister, sont contentes de les suivre. D’autres, sombrent dans la dépression, la boulimie, l’anorexie …
Alors qu’avec le progrès de la démocratie on pouvait espérer des rapports femmes-hommes apaisés, on a créé deux camps rivaux qui ne savent pas vivre ensemble. C’est ainsi que, si certains hommes, culpabilisant plus ou moins, prennent le parti des femmes, d’autres se sentant humiliés se regroupent pour se défendre et se trouvent de nouvelles « raisons » de dénigrer les femmes et de vouloir revenir en arrière.
La guerre déclarée, le dialogue devient impossible et des deux côtés tous les moyens sont bons pour abattre son ennemi. Au radicalisme de néo-féminismes répond l’extrémisme de masculinistes. Les deux s’entretiennent. Où mèneront-ils si la différence des sexes qui ne peut pourtant qu’enrichir l’humain en l’obligeant à être encore plus humain, n’est pas assumée ?
*Dans les années d’après Première Guerre Mondiale, de jeunes Allemands aux pères humiliés (par la Révolution Industrielle, par la défaite, par le Diktat, par le chômage, par l’inflation, par la difficulté à retrouver leur place à la maison) vont trouver un substitut de père chez le nazi.
Jean GABARD
Auteur de 3 essais aux Editions de Paris Max Chaleil, Paris.
« Le féminisme et ses dérives - Du mâle dominant au père contesté », 2006 réédité en 2011 avec le sous-titre : »- Rendre un père à l’enfant-roi »
« Materner ou éduquer – Refonder l’école », 2016
« Le néo-féminisme contre la famille », 2023
Conférencier
relations femmes / hommes éducation des enfants
[1] « Vers la guérison de l’homme malade » Elisabeth Badinter, X Y De l’identité masculine, Odile Jacob, 1992.
[2] « Ce n’est plus aux femmes de se remettre en cause, (…) C’est aux hommes de rattraper leur retard sur la marche du monde. » « Au XXe siècle, le féminisme consistait à vivre « comme les hommes » ; un jour, il aidera les hommes à vivre « comme les femmes » Ivan Jablonka, Des hommes justes. Du Patriarcat Aux Nouvelles Masculinités, Le Seuil, 2019.
[3] Lucile Peytavin «Le coût de la virilité Ce que la France économiserait si les hommes se comportaient comme les femmes » Anne Carriere Eds